19.7.07

Virumaandi (2004, Tamoul)


Une jeune juriste, qui réalise un film contre la peine de mort, interviewe gardiens et condamnés dans une prison. Un homme condamné à la prison à vie pour complicité de meurtre, Kotharala Thevar, lui raconte les circonstances qui l'ont conduit en prison.
Dans un petit village miné par la guerre des clans, il a eu le malheur de s'allier avec un fermier ivrogne et violent, Virumaandi (Kamal Hassan), qui a fini par massacrer 24 personnes avant de violer et d'assassiner sa nièce Annalakshmi que Kotharala lui avait promise en mariage.
La juriste interviewe ensuite Virumaandi, qui attend son exécution dans la même prison et dont la version des faits est bien différente de celle de son complice présumé.


Sur les plans narratif et cinématographique ce genre de procédé est toujours intéressant, car il souligne le pouvoir de manipulation du cinéaste, capable de faire croire à des faits pendant une heure pour les démentir dans la suite du film. Une telle méthode conduit parfois le spectateur à renoncer à savoir ce qui s'est passé, quand le film ne tranche pas entre les versions proposées, ou quand il apparaît que chaque personnage a sa vérité, ni plus ni moins valable que celle des autres.
Attention plein de spoilers à venir :
Ce n'est pas le cas ici. La version de Kotharala est clairement dénoncée comme mensongère par Kamal Hassan, qui veut montrer comment un homme a pu être injustement condamné à mort. L'effet suscité chez le spectateur est donc moins le doute que la compassion pour Virumaandi, renforcé par le fait que nous avons, nous aussi, pendant une heure, cru à tort à sa culpabilité.
Ce procédé présente en outre le risque d'ennuyer le spectateur en lui racontant deux fois les mêmes événements, dont on connaît l'issue. Kamal Hassan évite ce piège, car le récit de Virummandi insiste beaucoup plus sur ses moments d'intimité avec Annalakshmi, dont Kotharala n'avait pas connaissance, et parce qu'il va plus loin que celui de Kotharala, qui s'achevait sur un acquittement et n'expliquait donc pas comment les personnages s'étaient retrouvés en prison. En outre, quand les deux personnages rapportent les même faits, ce qui était au premier plan dans la version de Kotharala ne sert que de décor dans le deuxième récit. Ainsi en est-il de la fête au cours de laquelle Viruumandi se fait agressé.


Kamal Hassan est un acteur qui sait tout faire, dont je commence juste à découvrir les films et qui m'impressionne de plus en plus. Interpréter tour à tour un Virumaandi violent et sans scrupules puis sensible et amoureux était un défi dont il se sort très bien, surtout dans la deuxième partie. Abhirami, qui joue Annalakshmi, est elle aussi excellente.





C'est le deuxième film réalisé par Kamal Hassan que je vois, après le génial Hey Ram, et ce qui frappe avant tout, dans les deux films, c'est l'extrême violence de certaines scènes, au point qu'on se demande parfois si elle est bien nécessaire. L'usage qu'en fait Kamal Hassan dans Virumaandi est cependant intéressant. Dans le récit de Kotharala Thevar, bien que l'histoire qu'il raconte soit horrible, la violence saute moins aux yeux. On voit nettement moins d'hémoglobine, les meurtres sont présentés comme de simples faits par un personnage qui semble assez distant de ce qu'il raconte. Et pour cause, puisque son récit, que Kamal Hassan choisit logiquement de filmer d'une façon moins réaliste, moins frappante que la suite du film, se révélera être un tissu de mensonges, une fiction, dépourvue de la charge de réalité que porte la version de Virumaandi. En revanche, dans le récit véridique de Virumaandi, qui a été très affecté par les évènements, tout comme dans la dernière partie du film, après les flashbacks, la violence est présente dans toute sa monstruosité, et rejoint le message de Kamal Hassan : un meurtre, dans la réalité, est toujours un acte violent et monstrueux, qu'il soit puni par la loi ou légal.

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