17.2.20

Le nouveau cinéma indien : le contexte

A. Un cinéma commercial qui tourne en rond  

 

J’ai évoqué en introduction le non-renouvellement des acteurs de ce cinéma, et sa baisse de qualité à cette époque. Mais il déplaît aussi aux auteurs du nouveau cinéma sur un plan plus idéologique. Pourtant le cinéma commercial de l’époque est lui aussi politisé. Et, comme le nouveau cinéma, il défend des valeurs progressistes « de gauche » (sur le plan socio-économique en tout cas, beaucoup moins en ce qui concerne les questions de genres) : Indira Gandhi clame à qui veut l’entendre qu’il faut libérer les paysans du féodalisme, et faire disparaître la pauvreté, et de nombreux réalisateurs de films populaires font échos à ses propos, moitié par conviction, moitié par opportunisme. Mais dans ce cinéma la pauvreté est symbolisée par quelques scènes mélodramatiques, toujours les mêmes (une mère qui ne peut plus nourrir son fils, une jeune femme obligée de se prostituer… ). Bidonvilles ou villages sont reconstitués en studios sans aucun soucis de réalisme ni d’ancrage régional. L’injustice est vaincue par l’action d’un héros solitaire, presque surhumain. Et la réflexion sur les causes de cette pauvreté est réduite au strict minimum (c’est la faute de la corruption). Bref, le spectateur n’est pas incité à agir, encore moins à réfléchir. On lui propose simplement une revanche imaginaire sur les classes dominantes, le temps du film. 

B. Une plus grande ouverture au cinéma du reste du monde 


Ceux qui vont créer le nouveau cinéma ont heureusement de plus en plus accès à d’autres films, ceux produits dans le reste du monde. C’est la période du développement des ciné-clubs en Inde, bientôt suivi par le développement de la vidéo, permettant de découvrir les innovations d’autres auteurs indiens, mais aussi de partout ailleurs. L’International Film Festival of India joue le même rôle. Fondé en 1974, le Film and Television Institute of India est quant à lui à la fois un prestigieux centre de formation, d’où sont issus bon nombre d’acteurs et de réalisateurs du mouvement, et une cinémathèque. 

 

C. L’engagement de l’Etat 


Le nouveau cinéma indien, écrit Aruna Vasudev dans The New Indian Cinema (1986) « est né d’une décision gouvernementale ». Les modalités des aides financières et des récompenses attribuées influent fortement sur l’idéologie de ces films, et sur la prédominance de cette dernière sur la forme des films. Par ailleurs, si l’Etat soutient la formation professionnelle et la production des films, rien n’est fait pour permettre leur distribution en Inde : un grand nombre d’entre eux, après avoir fait le tour des festivals étrangers, ne sortiront jamais en salle ! Certains Etats indiens, comme le Bengale, alors communiste, coproduisent également des films. Il est important d’avoir conscience que ces films qui nous  paraissent si critiques envers la société indienne ont été financé par le pouvoir en place. Cela n’empêche pas d’autres formes de financement plus originales : Manthan, qui raconte la naissance d’une coopérative laitière regroupant des éleveurs intouchables, a été financé par 500 000 fermiers du Gujarat, membres d’une coopérative ! 

Une lassitude face aux films existants, la découverte d’autres cinémas, un effort financier de l’Etat : le nouveau cinéma est prêt à émerger. Mais en quoi est-il « nouveau » ?

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