13.3.09

Sita Sings the Blues, 2008

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Site internet du film, contenant des liens vers les différents sites où vous pouvez regarder ou télécharger gratuitement Sita. Le film (américain) est en anglais, non sous-titré, mais vraiment pas très compliqué à comprendre. Il dure 1h20, c'est court, alors n'hésitez pas !

C'est l'histoire de Nina, réalisatrice de dessins animés, qui apprend par un e-mail que son mari, parti travailler en Inde, a décidé de la quitter. C'est aussi celle de Sita, qui, enlevée par Ravana, reconquise par son époux Ram, doit lui prouver sa chasteté - ce qu'elle fait, mais elle n'en est pas moins finalement abandonnée par lui, histoire racontée par trois marionnettes qui ont une façon bien à elles de présenter le Râmâyana.



Partant de l'idée que l'histoire du Ramayana est universelle*, Nina Paley nous livre l'interprétation que peut en faire une femme, américaine, et vivant à notre époque, et présente sa lecture comme une parmi tant d'autres (les narrateurs insistent sur l'existence de nombreuses variantes du mythe).

Autant le dire tout de suite, cette relecture pleine d'imagination et d'humour de la célèbre épopée est un régal. Les narrateurs se contredisent, se trompent, rectifient leurs erreurs, donnant l'impression d'improviser pendant que les images se modifient en conséquence (voir l'hilarante présentation de Ravana, ou celle de la famille de Rama). Et Nina Paley met en image leur récit en recourant à de nombreux styles graphiques différents, allant de l'imitation de peintures indiennes à des images qu'on croirait sorties d'un jeu vidéo d'autrefois, par exemple lors de la chanson pendant laquelle Rama dégomme des dizaines de démons, en passant par des collages, des dessins crayonnés style BD...



Elle le met aussi en musique, comme le titre le laisse entendre, mettant dans la bouche de Sita de superbes chansons, d'Annette Hanshaw essentiellement, qui collent étrangement bien à l'histoire - ce sont d'ailleurs ces chansons qui sont à l'origine du film*. Et elle les accompagne de chorégraphies, peut-être le principal point faible du film, car le choix d'une animation assez rudimentaire les condamne à devenir vite un peu répétitives.

Les commentaires des trois marionnettes, secondées par la mise en parallèle avec l'histoire de la réalisatrice, mettent l'accent sur l'injustice subie par Sita, victime obligée de se justifier, puis épouse répudiée alors que son innocence est établie. Rama n'a pas le beau rôle dans cette relecture féministe du mythe, qui réussit à faire de la fin pourtant connue du mythe un retournement surprenant, en donnant un sens nouveau au départ de Sita qui retourne dans le sein de la Terre sa mère.



la bande-annonce :




* je traduis ce que Nina Paley dit sur son site à propos de l'importance de ces chansons dans le film : "Ce sont les chansons qui ont inspiré le film. Il n'y aurait pas eu de film s'il n'y avait eu ces chansons. Avant que je les entendent, le Ramayana n'était pour moi rien d'autre qu'une ancienne épopée indienne. Je voyais peu de rapport entre cette ancienne épopée et ma propre expérience de 2002. Mais les chansons d'Annette Hanshaw ont été une révélation : l'histoire de Sita a été racontée un million de fois, pas seulement en Inde, pas seulement par le Ramayana, mais aussi par le blues américain.[...]Elles sont la preuve historique qui vient soutenir l'idée centrale du film : l'histoire du Ramayana transcende le temps, l'espace et les cultures."