11.11.11

7aam Arivu - 7ème Sens

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Quel plaisir de voir un film tamoul au cinéma , et qui plus est sous-titré dans un français presque impeccable* ! Pour ce premier film tamoul diffusé à Saint-Denis, Aanna Films a choisi le blockbuster de l'année, réalisé par A.R. Murugadoss (Ghajini) avec en vedette Suriya et Shruti Haasan. Très prometteur donc.


L'histoire ? Une scientifique tamoule cherche à contrer un projet chinois de guerre bactériologique en réanimant les pouvoirs d'un grand médecin du VIè siècle, également champion d'arts martiaux, grâce à la génétique. Avec l'aide d'Arvind, le descendant de ce héros, elle va devoir affronter un redoutable agent chinois, maître de l'hypnose. Ça sens le grand n'importe quoi ? Pas faux (très vrai, même) mais ne passez pas votre chemin pour autant.

Car 7aam Arivu est techniquement très réussi : les scènes de combats ont de l'allure (si l'on fait abstraction des bruitages toujours très monotones), le flashback médiéval (consacré à Bodhidarma, personnage bien connu des amateurs d'arts martiaux) est visuellement splendide (on sent que l'argent n'a pas manqué). Le suspense est également plutôt bien mené.
Shruti Hassan joue un personnage important, elle n'est pas que le love interest d'Arvind, c'est le cerveau du petit groupe qui cherche à faire face à la menace bactériologique. Alors que je m'attendait à un film exclusivement centré sur Suriya, elle est elle aussi beaucoup à l'écran. Dommage cependant que son personnage ne soit pas plus creusé, et donc plus intéressant. Quant à Suriya, il a fière allure en combattant bouddhiste. Lors du flashback, Bodhidharma protège un village d'abord d'une épidémie, puis d'une horde d'envahisseurs, et je ne peux m'empêcher d'y voir une synthèse des fonctions de deux des principales divinités protectrices des villages tamouls, Mariamma (contre les maladies) et Ayyanar (contre les ennemis). Bref, le protecteur par excellence, très bien incarné par Suriya. Il n'est pas mal non plus en acrobate, et ses mimiques font merveille dans la partie comédie romantique.

L'aspect le plus sympathique du film, c'est la façon dont il intègre, outre les ingrédients de base de tout masala - c'est à dire une histoire d'amour, de l'humour (assez douteux ici) et de l'action, une importante composante "film d'arts martiaux", pas mal de science-fiction (pas toujours bien maîtrisée**), et, d'une façon plus étonnante, de vrais morceaux de film de zombie. Et oui, les personnes hypnotisées par l'ignoble Dong Lee perdent tout libre arbitre et obéissent à ses ordres - en général, tuer des gens. D'où une fantastique scène dans laquelle Suriya et Shruti sont pris pour cible par des véhicules de toute sorte d'où émergent ensuite des individus zombifiés assez peu amicaux.

Donc pour la forme (si l'on feint d'oublier les désastreuses chorégraphies et chansons, d'ailleurs visiblement vues par une bonne partie du public comme des intermèdes permettant de passer aux toilettes), pas grand chose à redire. Ça ce gâte en revanche quand on s'intéresse au fond : d'abord le discours anti-chinois assez bas du front (en gros : les Tamouls leurs ont enseigné le kung-fu et la médecine, et en échange ces ingrats de Chinois leur font la guerre). Visiblement Murugadoss n'est pas près d'oublier la politique chinoise au Sri Lanka. Puis les théories historiques et génétiques plus que fumeuses de notre scientifique (vous ne le saviez pas, mais un savoir acquis peut se transmettre génétiquement !) mise au service d'un nationalisme asséné avec la légèreté de l'éléphant d'Arvind. Moi un nationalisme agressif justifié par des pseudo découvertes scientifiques, ça me file des boutons. Et puis sérieusement, la culture tamoule est riche et passionnante : il y a moyen de faire un film qui lui soit consacré sans tomber dans ces délires. Heureusement ce discours est concentré dans les dernières minutes du film.



Bref, un film original et bien fait, gâché malheureusement à la fin par son discours pas subtil du tout et assez déplaisant.

* Presque, parce qu'il y a quand même un (assez court) passage en chinois traduit en tamoul, mais pas en français !

** Quand les dialogues insistent sur le fait qu'il ne faut surtout pas que notre mutant soit exposé à la lumière avant la fin de sa transformation, et que l'exposition tant redoutée se produit, on attend quelque chose d'un peu spectaculaire, pas juste un léger vieillissement de sa peau sans conséquence sur ses pouvoirs.