15.12.09

Dil se re

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Nouveau format d’article, pour pallier le manque de temps qui m’empêche en ce moment de voir des films entiers : un clip, un article.

Et pour commencer, sans surprise, Dil se. Mais pas "Chaiyya Chaiyya," plutôt un clip un peu méconnu, celui, en fait, que j’aime le moins du film : "Dil se re." Ce que je lui reproche : son esthétique très clipesque justement, et son imagerie au goût parfois douteux. Pourquoi cette faute de goût étrange, qui ne ressemble guère au reste du film ?



De quoi ça parle : Amar vient d’annoncer à l’étrange Meghna qu’il l’aime « dil se », du fond du cœur.

La musique commence, mais son rythme martial n’a rien de la ballade romantique attendue. Selon les conventions du genre, nous sommes désormais dans les rêves, voire dans les fantasmes d’Amar, dont le visage est filmé en gros plan avant le début du clip. D’ordinaire, le fantasme du héros de film hindi (en tout cas en 1998) est champêtre et montagneux, idéalement situé dans une pittoresque confédération alpine. L’atmosphère est calme, romantique, d’un érotisme en général apaisé.
On en est loin, lorsque dans une brume qui se révèle être plutôt de la fumée se dessine une silhouette de soldat. Au milieu des plans sur un village en guerre, un terrain de jeu, tout juste abandonné (le ballon de basket tourne encore sur lui-même).
Arrivée de l’héroïne, prise au cœur d’un savant jeu de silhouettes militaires. Elle est perdue, elle court. D’autre soldats, puis encore ce terrain de jeu : une balançoire, agitée par on ne sait quel souffle. Drôles d’images de soldats, fascinants dans le contre-jour.
Et voici enfin notre héros, un peu trouble, associé au feu. Il épie Meghna cachée derrière un mur. Et nous voici en terrain connu : commence en effet l’habituel ballet des baisers-presque-donnés-mais-jamais-tout-à-fait, de l’héroïne-qui-échappe-au-héros-mais-ne-s’éloigne-jamais-trop. Meghna sourit. C’est assez rare dans le film pour être souligné. Et Amar a une vilaine tendance à briser tout ses bijoux, comme autant de liens qui la relient à son passé. Mais si notre héros contenait, lui aussi, son lot de pulsions destructrices ?
Ce qui est moins conventionnel, c’est que notre couple va parcourir le village en guerre, échapper aux explosions, aux soldats. Il la tient par la main, la rattrape quand elle trébuche. Il se paie même le luxe de faire voler d’un coup de pied un de ces objets enflammés, symboles des destructions de la guerre. Et bien sûr, il trouve toujours un instant pour échanger avec elle un regard amoureux. Il assure, Amar, dans son rêve. On a même l’impression que c’est lui qui déclenche les explosions, par sa parole et ses gestes.
Un trou d’obus se transforme en nid d’amour. La guerre offre un arrière plan idéal à son idylle, l’occasion de montrer sa bravoure, de sauver sa belle. Il regrettait, après leur première rencontre, qu’il n’y ait pas de méchants à qui il puisse l’enlever, sur son cheval blanc. Sa découverte du flou qui entoure le passé de Meghna lui permet d’inventer d’autres ennemis, plus réalistes.
Et surgissent enfin ceux que le ballon et la balançoire nous faisaient attendre : les enfants. Ces enfants sans qui un film de Mani Ratnam serait incomplet. Ces créatures toujours angéliques, plus que jamais symboles de paix et d'espoir. Plus de soldats en vue, mais un joyeux troupeau en pulls chamarrés, et un petit garçon avec lequel Amar joue, petit bonhomme vêtu comme lui, puis deux gosses isolés des autres : ceux du couple ? La paix est revenue, Amar a sauvé sa belle qui n’attendait que ça, les voici à la tête d’une petite famille.
Le décor se fait plus bucolique. Il reste bien quelques flammes et quelques barbelés, mais ce sont désormais les champs et les rivières qui dominent, et ce pont, par lequel Meghna fuit le village en feu pour se jeter dans les bras d’Amar, alternative à la guerre. Car ce sont bien les deux aspects du personnage : fasciné par le passé trouble de Meghna, par la violence qui l’entoure, il rêve aussi de l’en sortir, selon une alternative (l’amour ou la guerre) dont le film révèlera cruellement la naïveté et l’égoïsme : il n’y a que dans le fantasme d’Amar que Meghna se jette dans ses bras. Lorsqu’à la fin du film il ouvrira de nouveau les bras, dans ce geste si typique des héros de film hindi, elle tentera de l’éviter.

Mauvais goût des scènes de guerre teintées d’érotisme, certes. Mais mauvais goût qui a un sens : c’est celui d’Amar, et cela en dit long sur la façon dont il conçoit son amour pour Meghna.

Traduction des paroles.

24.11.09

R.I.P. Abrar Alvi

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Décédé le 18 novembre dernier à l'âge de 82 ans, Abrar Alvi était un réalisateur et surtout scénariste et dialoguiste indien, actif depuis les années 1950, et à l'origine de quelques uns des plus beaux films de cette époque.
Son nom est inséparable de celui de Guru Dutt : il a écrit les dialogues, et parfois le scénario, de la plupart de ses films. Inséparable au point que lorsque Guru Dutt, qui a renoncé à la réalisation, décide de produire Sahib Bibi aur Ghulam (1962), c'est à son ami qu'il confie cette touchante évocation du déclin d'une famille d'aristocrates, ne se réservant que les séquences chantées. Abrar Alvi remportera le Filmfare Award du meilleur réalisateur.
Abrar Alvi, c'est l'élégie parfois teintée d'amertume de Pyaasa et Kaagaz ke Phool mais aussi l'humour caustique de Mr &Mrs 55, ce sont des dialogues qui sonnent juste et des scénarii sans faille, toujours ancrés dans la réalité de son époque, dont on aimerait sentir davantage l'influence aujourd'hui.

Outres ses mémorables collaborations avec Guru Dutt, Abrar Alvi avait aussi écrit, entre autres, Professor, avec Shammi Kapoor.

28.10.09

Prabhas, la suite.

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2006 - Pournami, de Prabhu Deva, avec Charmee et Trisha, est certainement le film de Prabhas qui a le scénario le plus original. L'action se passe dans les années 1970. Tous les douze ans, une danse sacrée doit être réalisée par une fille de la famille de Charmee. Mais sa soeur aînée (Trisha) formée pour accomplir cette danse, s'est enfuie, menacée par un des meilleurs méchants de tous les temps, Rahul Dev, dans le rôle du zamindar cruel mais mélomane (ce qui nous vaut une scène d'anthologie). Arrive Prabhas, prof de rock, qui va convaincre Charmee de perpétuer la tradition. En effet, il a rencontré Trisha lors de sa fuite...
Il faut admettre qu'il y a d'énormes trous dans ce beau scénario, mais qu'importe ? On a deux héroïnes vraiment bien (si si, même Trisha), deux vraies histoires d'amour, qui ne sont pas juste là pour agrémenter un film d'action, un Prabhas vraiment très bon, et pas que pour faire le clown ou se battre , quelques scènes marquantes (le sang séché sur la chemise du mort, qui marque la fin de la trève en changeant de couleur) Et surtout, de très très beaux clips (en même temps avec Prabhu Deva à la réalisation, ce n'est pas vraiment une surprise), qui font la part belle à l'émotion.

Le mariage, ou comment contourner la censure par une chanson et un clip qui arrivent, miracle, à ne pas être du tout vulgaires.



et Pournami nous apporte la preuve n° 5 que Prabhas est un gars parfait : il est à la fois Shiva et Krishna :



Chatrapathi a très bien marché, et il était tentant de continuer sur la lancée et d'exploiter un filon similaire.
C'est ce que tente de faire en 2007 Vamsi Paidipally avec Munna dans lequel Prabhas a, aux côtés d'Ileana D'Cruz , un rôle de justicier assez proche de celui de Chatrapathi. Problème, Vamsi Paidipally n'est pas Rajamouli, Ileana ne vaut pas Shriya (qui apparaît dans un des clips !), et le scénario bat des records d'invraisemblance. Même Prakash Raj, dans un rôle bien rodé de père indigne, n'a pas l'air en forme. Enfin, quelqu'un a eu l'étrange idée de coiffer Prabhas comme Mahesh Babu. Un look qui va bien au Prince, un peu moins à notre young rebel star. Restent, comme d'hab', quelques clips vraiment bien.




Mais Munna est un chef-d'oeuvre à côté de l'autre film dans lequel Prabhas a joué en 2007 : Yogi. Il y joue un brave gars qui déteste la violence mais dézingue à tour de bras du début à la fin du film, pendant que sa maman le cherche dans toute la ville, au côté de Nayanthara, dans un rôle strictement décoratif. Dès qu'il pense à elle (à sa mère, pas à Nayanthara, qui ne sert vraiment à rien), notre grand dadais se met à danser en clignant des yeux.
Les chansons se distinguent surtout par leurs paroles très explicites.


Preuve n° 6 que Prabhas est un gars parfait : il marche mieux que le botox.


Deux échec publics et critiques, et un changement (relatif) de registre : dans Bujjigadu (2008), Prabhas est une fois de plus un rowdy, qui cherche à retrouver son amour d'enfance Chitti (Trisha, exaspérante), le scénario est toujours aussi peu vraisemblable, mais les dialogues laissent une large place à l'humour, et cela (plus un Prabhas plus athlétique que jamais) sauve largement le film.


Preuve n° 7 que Prabhas est un gars parfait : euh... non, en fait, rien.

En revanche la musique est un peu décevante, et les paroles en télhinglish (ou hindluglish ?), mélange peu harmonieux de télougou, d'anglais et de hindi, peuvent agacer.


Preuve n° 7 que Prabhas est un gars parfait : il est fan de Rajinikanth !



et preuve n° 8 que Prabhas est un gars parfait :

enfin, en 2009, un rôle en forme de consécration : Billa, dans lequel il succède à Amitabh Bachchan, Shahrukh Khan (Don), Rajinikanth et Ajith. Rien que ça.


Et voici donc notre héros qui se dédouble, pour incarner le gentil voleur Ranga et le vilain gangster Billa. Rapidement, Billa disparaît, et Ranga le remplace pour permettre à la police de démanteler son gang. Pour être honnête, Prabhas en Billa, ça ne marche pas très bien. Par contre en Ranga il est assez excellent. Anoushka, à ses côtés, est également bien.
Le film fonctionne plutôt pas mal, malgré une histoire connue et des clips passe-partout.







et pour finir, la chanson éponyme de Ek Niranjan, sortie prévue le 29 octobre


Prabhas !!

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A l'occasion de la sortie prochaine de Ek Niranjan, retour sur la carrière de la Young Rebel Star du cinéma télougou.
Profitons également de l'occasion pour rendre hommage au bien nommé Prabhasmyhero dont les différents comptes sont incontournables pour les fans de l'acteur.

Tout a commencé avec Eeshwar, en 2002, réalisé par Jayant C. Paranjee, avec Sridevi.
Le jeune acteur, incarnant Eeshwar, n'était pourtant pas un inconnu : il est en effet le neveu d'un acteur bien connu, devenu homme politique, Krishnam Raju Uppalapati.
Eeshwar, un garçon pauvre et orphelin de mère, a le coup de foudre pour une jeune fille riche, Indu, fille d'un homme politique qui n'aime pas les pauvres. Pendant qu'il tente de l'approcher son père se remarie. Toute la première moitié est consacrée aux tentatives d'approches d'Eeshwar, la deuxième aux inévitables heurts avec le père vraiment pas sympathique d'Indu. C'est en tout cas ce que j'ai pu comprendre en l'absence de sous-titres.
Le gros défaut du film : une héroïne incarnée par une actrice pas terrible (une Sridevi qui n'a rien à voir avec La Sridevi), et parfaitement cruche. Les personnages féminins ne sont pas à la fête dans ce film (la belle-mère se fait descendre dès qu'elle décide de prendre son destin en main), mais Indu en rajoute une couche, n'hésitant pas à se punir elle-même à chaque fois qu'elle brave l'autorité paternelle (en s'ébouillantant la main, quand même).
Le plus : des musiques super entrainantes et de belles chorés , une histoire simple mais touchante.
Et Prabhas, dans son premier rôle ? Dur de deviner qu'il débute. Il révèle quelques uns de ses principaux atouts : un certain talent de danseur, une sacré classe dans les (nombreuses) bastons, un jeu juste dans les moments d'émotion, et surtout un charme fou.


Preuve n° 1 que Prabhas est un gars parfait : dans les dappa, il assure grave.

(à partir de 7 min 29)

2003 :- Raghavendra, réalisé par Suresh Krishna, avec Swetha Agarwal et Anshu.
Deuxième film et première catastrophe.

Raghavendra est un swami qui vit dans un ashram. Il attire les regards de Mahalakshmi, qui s’est bien rendu compte que ce swami n’était pas comme les autres : non seulement il fait face sans trembler à un éléphant déchaîné, mais en plus il est joué par Prabhas, à qui les habits minimalistes de saint homme (un lunghi et euh… c’est à peu près tout) vont très bien. Pourtant, celui-ci n’intervient pas quand elle se fait agresser. Au lieu d’aller l’aider, Raghavendra est assailli par des images traumatisantes, qu’un flashback va bien sûr nous expliquer. Autre fois, il était une véritable brute qui aurait dû suivre une thérapie pour apprendre à contrôler sa colère un courageux jeune homme qui ne tolérait pas la moindre injustice, au risque de mettre la vie de ses proches en danger. Jusqu'à ce qu'un jour...
Scénario parfaitement crétin (la non-violence ça va deux minutes, m'enfin quand même, faut bien que quelqu'un aille casser la gueule aux méchants à la fin), scènes d'agression filmées avec une complaisance très désagréable, chorés moches et molles, musique du même niveau, et un Prabhas à qui le lunghi va certes très très bien, mais qui n'arrive pas à faire grand chose de son personnage. Et pas de sous-titres, pour tout arranger.

Preuve n° 2 que Prabhas est un gars parfait : il a la classe en lunghi.



2004 - Varsham, de Sobham, avec Trisha, Gopichand, Prakash Raj.

Premier succès commercial, bien mérité pour ce bon film. Varsham, c'est la pluie, celle qui ne cesse de réunir Prabhas et Sailaja, malgré l'opposition de l'horrible père de la belle, joué par un Prakash Raj toujours aussi réjouissant, et surtout malgré l'infâme zamindar joué par Gopichand (acteur qui est un des meilleurs amis de Prabhas). Superbe musique, clips très sympa, Trisha presque jamais énervante, pas trop de violence, et une jolie histoire d'amour qui sonne juste.




2004 - Adavi Ramudu, de K. Raghavendra Rao, avec un éléphant.


pas vu.

2005 - Chakram, de Krishna Vamsi, avec Charmee, Asin
Pas vu non plus, mais j'aime bien cette chanson :




2005, Chatrapathi, de S.S. Rajamouli, avec Shriya.


Réfugié du Sri Lanka, Sivaji est séparé de sa mère et de son frère. Devenu adulte, il est forcé de travaillé pour la mafia qui exploite les réfugiés. Jusqu'au jour ou il devient "Chathapathi" et libère les réfugiés tamouls de l'oppresseur, affrontant des ennemis de plus en plus cruels, parmi lesquels se trouve son propre frère, légèrement dérangé. Ce qui lui laisse quand même le temps de partir à la recherche de sa maman, et de se laisser conquérir par Shriya, dont le personnage est loin d'être uniquement décoratif, et qui est en plus assez douée pour la comédie, domaine dans lequel notre héros se débrouille également fort bien.
La musique (y compris la musique de fond ) est vraiment bien, les clips assez délirants, bref que du bonheur.

L'item number de Arti Agarwal :






et la preuve n° 3 que Prabhas est un gars parfait : en cas d'attaque de requin, on est en sécurité avec Prabhas


ainsi que la preuve n° 4 :



La suite bientôt...

7.10.09

La chimie en sari

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Les héroïnes de films indiens n'ont longtemps eu que peu de carrières possibles : quand elles avaient un travail, ce qui n'était pas si fréquent, elles étaient en général médecins (ou infirmières) ou enseignantes, deux des rares professions considérées comme acceptables pour une jeune femme respectable, selon la vieille répartition des tâches qui veut que la femme élève les enfants et prenne soin des malades de la famille.

Voici quelques unes des plus mémorables filmi adhyaapikaen :

Un cas intéressant pour commencer, celui du professeur de danse, situé quelque part entre l'enseignante de matières scolaires (profession respectable pour une héroïne) et la danseuse professionnelle (personnage toujours ambiguë):
Madhuri, occupée à recruter ses élèves :





Malgré les facilités évidentes que présente le personnage du prof de danse en termes d'insertion des numéros dansés, celui-ci n'est pas, et de loin, le membre du corps enseignant le plus représenté dans le cinéma du sous-continent.


Ce titre revient à l'institutrice, dont l'âge d'or semble avoir été la belle période des Nargis et Waheeda Rehman.

Nargis donc, dans Shree 420, met en place une pédagogie ludique fondée sur la devinette. En musique, évidemment.







On remarquera que le cours est perturbé par les interventions du personnage masculin, motif qu'on retrouvera dans Swades. Shahrukh entre dans la classe et ridiculise Geeta l'institutrice devant ses élèves en évoquant le temps où elle était petite fille, puis fait mine de faire cours, minant ainsi totalement son autorité.




Geeta a des convictions, et elle rejette un prétendant qui lui demandait d'abandonner son métier après le mariage, mais l'irruption de Mohan dans sa vie modifie quelque peu sa façon de faire cours (à partir de 2'03'' dans cette vidéo).

Esha Deol
doit également faire face à l'arrivée inopinée de son ami dans Yuva (Ajay Devgan) et Aayitha Ezhuthu (Surya), deux versions, l'une en hindi, l'autre en tamoul, du même film dans lequel elle enseigne... le français !

Mais revenons à nos années 50, et aux maîtresses d'école : Geeta Dutt prête sa voix à Waheeda Rehman pour son cours de maths, avant que celle-ci ne renonce à l'enseignement et à son petit village pour partir à Bombay vivre au milieu des fleurs de papier (Kaagaz ke phool) de l'industrie du cinéma. L'opposition entre les deux mondes est très clairement établie dans le film.





Quand notre héroïne enseigne à des élèves plus âgés, elle peut être, comme dans Yuva, professeur de français, ou alors, comme Sushmita Sen, prof de chimie, mais l'on soupçonne Farah Khan de ne lui avoir attribué cette matière que pour pouvoir faire un jeu de mot en disant qu'elle et le major Ram "share a great chemistry", ce qui est incontestable :




Et parce que ça vaut de l'or, l'arrivée de Miss Chandni dans le lycée. Je veux bien un comité d'accueil comme ça ^^.



"What a lovely saree" : tout à fait d'accord. Et la pochette assortie, la classe !

7.8.09

L'Adversaire (Pratidwandi) - bengali, 1972

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L’adversaire, c’est Siddharta, jeune homme de Calcutta, à l’aube de la vie active, qui hésite, qui se trompe, en constante lutte avec celui qu’il aurait voulu devenir et qu’il ne pourra pas être.


Médecin, voilà ce qu’il aurait dû devenir, si son père en mourant ne l’avait pas contraint à prendre en charge sa famille, lui, le fils aîné. Il a donc interrompu ses études pour trouver un travail. Sans succès. C’est sa sœur – quelle honte ! - qui fait vivre la fratrie et leur mère. Sa sœur qui fait des heures supplémentaires, et qu’on vient accuser de séduire son patron. Siddharta lui ferait bien la peau, à celui-là, mais il n’ose même pas lui dire ce qu’il pense. C’est en rêve qu’il se venge, dans une séquence inspirée par le cinéma de Bombay, où ce que désire le personnage est d’abord présenté comme ayant réellement eu lieu, avant un brusque retour à la réalité. Il a souvent ce genre d’hallucinations, Siddharta. Des bouts de cours d’anatomie lui reviennent de façon cocasse quand il croise une jolie passante.


Car il a du mal à oublier le passé, le temps heureux de son enfance, bercé par le chant si mélodieux d’un oiseau dont il ignore le nom. Dur d’oublier aussi l’avenir qu’il se promettait. Les jobs qu’on lui propose ne l’enchantent guère. On se demande même parfois s’il cherche vraiment à être embauché, à voir la façon dont il échoue à son premier entretien. Il y a bien cette vieille connaissance qui lui propose un travail pas trop mauvais, mais c’est loin de Calcutta, loin de sa famille. Et Siddharta hésite, pendant tout le film.


Bien sûr Calcutta, ce n’est pas parfait. La chaleur y est étouffante. Et il y a ces bombes qui explosent de temps à autre. Mais il y est habitué. Le spectateur européen ne trouvera pas d'exotisme ici. Satyajit Ray dépeint la capitale du Bengale comme n’importe quelle grande ville de cette époque, vue à travers ses transports en commun, ses cinémas, ses rues bourgeoises ou ses appartements miteux. On est loin du décor rural et traditionnel de La Complainte du sentier ou du Salon de musique.


Siddharta n’a pas très envie de quitter le nid. Mais il faut trouver un emploi. Ce n’est pas son petit frère, encore étudiant, qui va nourrir la famille. Aura-t-il jamais un travail, celui-là. Il revient tous les soirs blessé, il veut convaincre son aîné de la nécessité de la lutte armée, pour renverser le capitalisme, pour changer ce système dans lequel Siddharta cherche à s'intégrer. Mais ce n’est pas sa voie, l'action violente. Oh, son cœur bat bien à gauche : lors de ce premier entretien, si désastreux, il cite la résistance des Vietnamiens face à l’armée américaine comme l’événement le plus important des vingt dernières années – ce qui lui coûte le job. Son problème, c’est plutôt l’action. La prise de décision. L’engagement.

Ne lisez pas ce paragraphe si vous avez peur des méchants spoilers :

Mais Siddharta va bien devoir grandir. Accepter que la vie ne soit pas comme il la rêvait. Mais pas se résigner, non. Au contraire, c’est sa révolte, sa colère mémorable lors de l’attente interminable, en pleine chaleur, pour un deuxième (et dernier) entretien, qui marque son passage à l’âge adulte. Il quittera Calcutta, alors même qu’il venait de trouver, en la personne d’une belle jeune femme, une bonne raison d’y rester. Une attache choisie, cette fois-ci. Mais ce départ n’est pas une séparation définitive. Il lui écrit. Pour lui dire que la campagne est belle, et qu’il a enfin retrouvé l’oiseau de son enfance.





réalisé par Satyajit Ray,
avec Dhritiman Chatterjee, Krishna Bose, Indira Devi, Kalyan Chowdhury, Joysree Roy, Debraj Roy, Sefali
DVD Films Sans Frontières, sous-titré français, disponible dans tous les bons magasins.



A voir absolument.

5.8.09

Sita chante le blues le 12 août

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Le remarquable film d'animation de Nina Paley, dont j'avais déjà eu l'occasion de parler, sort au cinéma en France, le 12 août donc. Pour les amateurs de jazz, de mythologie, et de films d'animation surprenants.



bande-annonce :

4.8.09

Meilleur chanteur contemporain - finale !

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Les résultats du tour précédent :


Finale qui oppose Udit Narayan, Sukhwinder Singh, et l'outsider A.R. Rahman, plus connu comme compositeur que comme chanteur.
C'est le moment ou jamais de faire connaître vos chansons préférées des trois candidats !

Ma sélection, qui vient s'ajouter aux chansons déjà proposées pour les tours précédents :

A.R. Rahman : Antha Arabic Kadaloram - Bombay
Sukhwinder Singh : Jai Ho (Slumdog Millionaire), peut-être pas la meilleure chanson, mais une belle interprétation.
Udit Narayan : Ahista Ahista, de Swades.

Vous pouvez retrouver les précédentes playlists ici.



25.7.09

Roti, Kapada aur Makaan (1974) et demi-finale du championnat des chanteurs

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Roti Kapada aur Makaan mêle de multiple intrigues, qui tournent toute autour de Bharat (le réalisateur, Manoj Kumar) et de ses proches. Notre héros, diplomé mais chômeur, voit sa fiancée le quitter pour son riche employeur. L'un de ses frères a fui la famille après avoir commis un vol. Sa jeune soeur ne parvient pas à se marier faute d'argent. Une de ses amies élève seule son enfant, né d'un viol. Quant à Bharat, désespéré de n'avoir pas réussi à acheter les médicaments qui auraient pu sauver son père, il finit par accepter de gagner sa vie grâce au marché noir.

C’est un tableau très sombre de l’Inde des années 1970 que nous propose Manoj Kumar . Il montre des jeunes gens désespérés, qui on dépensé tout l’argent de la famille dans des études couteuses, mais qui ne leur permettent pas d’avoir «roti, kapada aur makaan» : du pain, des vêtements un toit. L’honnêteté intransigeante de Bharat ne pèse pas grand-chose face à l’argent qui détruit les couples et permet à de riches commerçants d’abuser d’une jeune fille pauvre. Pour marier sa sœur, il accepte de gagner de l’argent sale et rejoint le camp des affameurs.


Manoj Kumar a un talent certain, mais il a aussi un gros défaut : il assène son message avec une lourdeur peu commune, au point que j’ai failli ne pas dépasser la première demi-heure. Entendre Amitabh Bachchan, ou le réalisateur lui-même, déclamer des discours sur l’état lamentable de la nation face à la caméra ne me passionne pas outre mesure. Par chance une fois l’histoire lancée il renonce à ce mode d’expression directe, et c’est à travers un récit très allégorique, ainsi qu’au moyen de procédés purement cinématographiques que sa thèse va désormais s’exprimer.

Bharat, le prénom du héros, est le nom hindi de l’Inde, de cette nation que l’injustice à la pauvreté risque de faire basculer dans le crime. Son amie Tulsi est violée par un marchant de blé, un marchant de vêtements et le propriétaire de sa maison : ceux donc qui auraient dû lui fournir le pain, les vêtement et le toit du titre, et qui deviennent le symbole de tous les maux de l’Inde. Quant à l’affrontement final, il oppose les affameurs à Bharat, secondé par un de ses frères devenu soldat, un autre devenu policier, et le seul entrepreneur honnête du film : les trois sauveurs du pays. La démonstration frôle parfois le ridicule : ainsi, Bharat renonce à ses entreprises criminelles après avoir entendu un discours d’Indira Gandhi à la radio. Imagine-t-on le héros d’un film français ramené sur le droit chemin par un discours de Giscard ? Manoj Kumar n’est assurément pas dans l'opposition : s’il souligne les maux dont est affligé son pays, dans une époque de fortes tensions sociales, c’est pour mieux montrer le chemin vers une société meilleure, au côté du premier ministre (qui décrétera l’état d’urgence l’année suivante).



Roti Kapada aur Makaan est un film très eisensteinien : le montage, et plus généralement l’ensemble des éléments du film, sont au service d’un discours. D’où la multiplication d’effets qui attire l’attention sur le film lui-même, et sont un moyen d’expression. Ces procédés paraissent parfois assez naïfs : le héros est bouleversé par la destruction d’une maison, et on le voit tour à tour à l’endroit et la tête en bas. C’est parfois plus subtil, et d’un rendu plus intéressant. Ainsi, lorsqu’une complice de Bharat tente de détourner l’attention des policiers qui le poursuivent : sa robe est décorée d’un petit miroir rond, à la hauteur de son nombril, qui reflète un oeil. On a dans la même image le regard du policier et la partie du corps de la jeune femme qu’il regarde au lieu de faire son travail. Dénonciation d’un certain comportement, mais aussi procédé au service du récit puisqu’il s’agit de retenir la police le plus longtemps possible.

Parfois ces procédés sont purement gratuits, comme lors de la chanson « Main na bhooloonga », au cours de laquelle Manoj Kumar utilise avec une certaine imagination tous les effets permis par son maigre budget. Ça peut faire sourire, pour ma part je trouve ça assez poétique.





C’est un film que je recommande, malgré ses défauts (un autre, dont je n’ai pas parlé, est la monotonie du jeu de Manoj Kumar). Passé la première demi-heure le rythme est soutenu, la musique et les clips sont plaisants, et le film est plein d’inventions visuelles.

réalisé par Manoj Kumar
avec : Zeenat Aman, Moushmi Chatterjee, Manoj Kumar, Shashi Kapoor, Amitabh Bachchan (dans un petit rôle)
musique de Laxmikant-Pyarelal

DVD Spark, image magnifique, sous-titres anglais et français (qui ont l'air compréhensibles)



* * * * *

résultats du second tour du sondage portant sur les meilleurs chanteurs : adieu Kumar Sanu, Shaan et KK.

A.R. Rahman, Roopkumar Rathod et Rahat Fateh Ali Khan atteignent le troisième et avant-dernier tour.





Vous pouvez désormais voter pour le troisième tour (dans la colonne de droite). Vous avez deux votes, pour choisir les deux élus qui iront en finale.

Les playlists précédentes sont toujours disponibles ici, pour faciliter le vote en rappelant quelques unes des meilleures interprétation des concurrents.


A.R. Rahman : Chale Chalo
Sukhwinder Singh : Haule Haule
Rahat Fateh Ali Khan : Jag Soona Soona Lage
Udit Narayan : Ae Ajnabi
Roopkumar Rathod : Maula Mere Maula
Sonu Nigam : Kal Ho Na Ho


10.7.09

deuxième tour du sondage

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voici les résultats du premier tour.



Les égalités ont rendu difficile un second tour à cinq participants, j'ai donc changé de formule : Udit Narayan, Sukhwinder Singh (en tête, yeah !) et Sonu Nigam ont été choisis par plus de 50 % des votants, ils sont donc qualifiés directement pour le troisième tour. Sont présents à ce second tour ceux qui sont arrivés 4èmes et 5èmes, ainsi que K.K. et Shaan, victimes d'un impardonnable oubli de ma part. Adieu Shankar Mahadevan (snif, snif) , SPB, Kailash Kher, Javed Ali et Rashid Ali.

Une deuxième playlist est à votre disposition, la première est toujours ici

1. Kumar Sanu : Do Dil Mil Rahe Hain
2. Rahat Fateh Ali Khan : Zindagi Ye
3. A.R. Rahman : Dil Se Re
4. Roopkumar Rathod : Tere Liye
5. Shaan : Chand Sifarish
6. K.K. : Ajab si






Comme d'hab' les commentaires sont les bienvenus


Sur une suggestion de Didi,
Kumar Sanu :
Baazigar o Baazigar

Vivah - 2006

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Poonam est une jeune orpheline élevée par son oncle et sa tante. Bien que ce soit une jeune femme modèle, cette dernière la déteste car elle fait de l'ombre à sa fille. Un ami de son oncle propose de présenter Poonam à Prem, jeune homme de bonne famille, en vue d'un mariage ("vivaah"). Poonam et Prem se plaisent instantanément.

J'avais plein de bonnes raisons de ne pas regarder ce film :

- Hum Aapke Hain Koun, du même réalisteur, m'avais profondément ennuyée.
- L'idéologie qu'il défend de film en film me file des boutons.
- Je ne suis pas du tout fan des acteurs (Shahid Kapur et Amrita Rao)
- "A journey from engagement to marriage"... clairement pas mon type de film.

Mais la curiosité a eu le dessus (après tout ce film a connu un beau succès commercial), et je l'ai mis dans le lecteur, en m'attendant à finir le film passablement énervée.

Mais je n'ai pas jeté le DVD par la fenêtre, et j'ai fini le film sans m'être mise en rogne. Sooraj R. Barjatya est habile, il vous enveloppe dans la guimauve et le miel : les mélodies sont douces, les couleurs pastel, Shahid attendrissant (contrairement à une idée répandue, il n'avait pas 15 ans à l'époque du tournage, mais 25 ans ^^) et pendant les trois quarts du film le pire danger que courent les personnages est d'attraper un rhume ; leur seul dilemme est de savoir s'ils ont le droit de discuter en tête à tête. Le seul véritable évènement, dramatique, arrivera selon la recette de Hum Aapke Hain Koun, après 2h de film. Selon la sensibilité de chacun, l'ensemble oscille entre mignon et niais. Pas vraiment énervant à première vue, juste un peu abrutissant.



Et pourtant, malgré ses apparence inoffensives, Vivah est un film engagé, engagé pour la défense d'une vision très conservatrice de la société indienne, et en particulier du rôle de la femme hindoue. Il n'y a qu'à voir le contraste établi entre Poonam et sa cousine. Poonam, la jeune fille idéale, est réservée, docile et dévouée à sa famille. Traduisez : elle est d'une timidité maladive (la première rencontre avec Prem !), passive, et renoncerait sans peine à mener une vie heureuse. Comme dans HAHK, la catastrophe finale est pour elle l'occasion de montrer qu'elle est prête à se sacrifier. Sa cousine au contraire est extravertie et sûre d'elle ; en outre elle a la peau foncée, c'est lourdement souligné par les dialogues - alors que les maquilleurs ont étalé une bonne couche de fond de teint blanc sur le visage d'Amrita Rao - : personne ne veut donc l'épouser. Poonam en revanche est l'épouse idéale, celle qui fait dire à son oncle "comment peut-on dire que les filles sont des fardeaux pour leur père, alors qu'elles passent toute leur existence à s'occuper de leur famille et à se dévouer pour elle?". Cette déclaration est présentée comme progressiste (il s'agit de lutter contre l'idée qu'une fille coûte cher à sa famille et ne rapporte rien ; plus tard le film dénonce également les Dowry deaths -"morts pour cause de dot insuffisante"), mais j'ai quand même déjà vu plus féministe comme programme.






vous savez quoi ? je vais quand même remettre ça avec Ek Vivaah.. Aisa Bhi. Pour Sonu Sood.


DVD Bollywood Zone, sous-titres français pas professionnels, mais compréhensibles ; image assez moyenne.

6.7.09

sondage en péril !

11 commentaires
dites, je sens bien une vilaine égalité pour la quatrième et la cinquième place du sondage sur le meilleur chanteur (à droite de la page). ça va pas le faire : comment je fais un second tour dans ces conditions, moi ?

Pour vous aider à choisir, voici une playlist dans laquelle vous pouvez entendre une des meilleures interprétation des chanteurs du sondage, dans l'ordre suivant:

1.Udit Narayan : Main yahaan hoon
2. Shankar Mahadevan : Jhoom
3.Sukhwinder Singh : Chaiyya Chaiyya
4.Kumar Sanu : Tujhe dekha to
5. S. P. Balasubramaniam : Pehla pehla pyaar
6.Kailash Kher : Ya Rabba
7.Rahat Fateh Ali Khan : Mann ki lagan
8.A.R. Rahman : Yeh jo desh hai tera
9.Sonu Nigam : Main agar kahoon
10.Javed Ali : Jashn-e-bahaara
11.Roop Kumar Rathod : Tujh mein Rab dikhta hai
12.Rashid Ali : kabhi kabhi Aditi




Je n'ai pas fait très original, n'hésitez pas à proposer en commentaire les chansons qui vous semblent les plus représentatives du talent de chaque chanteur.

30.6.09

Kal ho na ho (New York Masala) - 2003

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Je n'arrive pas à croire qu'il n'y a pas quelque part sur ce blog un petit article consacré à ce film. Je n'ai jamais autant versé de larmes au cinéma. Même si ce n'était pas un bon film (et ce l'est !) il mériterait un article pour cette raison.


Aman, Rohit et Naina


Naina vit à New-York avec sa mère, sa petite sœur, son petit frère et sa grand-mère qui idolâtre ce dernier et déteste les deux autres. Entre les études, les disputes domestiques, le restaurant famillial qui bat de l'aile et les peines de cœur de sa voisine et amie, Naina n'a pas vraiment le temps de penser à elle, et encore moins d'avoir une vie sentimentale. Son meilleur ami Rohit, spécialiste des plans drague foireux, n'est pas d'un grand secours. Mais bientôt emménage dans son quartier Aman, qui décide d'être l'ange gardien de la famille...

Le réalisateur, Nikhil Advani, est l'ancien assistant de Karan Johar, et l'influence de celui-ci, producteur du film, est plus que sensible. Selon la bonne vieille recette de "KJo", Kal ho na ho ("Il n'y aura peut-être pas de lendemain") est un efficace mélange de comédie et de mélo, qui aurait pu être indigeste mais est sauvé par un rythme à tout épreuve. Le visuel, coloré, et moderne, est soigné, mais les amateurs de saris et de chorégraphies traditionnelles risquent d'être déçus. Ce qui n'empêche pas les chorégraphies en question d'être dynamiques et assez réjouissantes, malgré une musique un peu faible (à l'exception de la magnifique chanson titre interprétée par Sonu Nigam).




Les gags fusent, avec plus ou moins de succès, mais il y en a tellement que ce n'est pas grave s'il y a un peu de perte. L'un d'entre eux, un running gag sur la relation qu'entretiennent Aman et Rohit, franchement drôle, est remarquable par le regard certes humoristique, mais dénué de jugement, qu'il porte sur l'homosexualité, un sujet encore tabou en Inde. Mais ce qui fait le talent d'Advani et de Johar, c'est que, plus que le gag, on retient la belle amitié des deux personnages. Malentendus et quiproquos sont au cœur du film, ils sont les ressorts de la comédie mais aussi de la tragédie, qui tourne autour d'un fait qu'Aman croit devoir dissimuler, je n'en dirai pas plus.

Si comme dans de nombreux autres films, on a globalement la comédie dans la première partie et la tragédie dans la seconde, la coupure n'est pas brutale. La vie de Naina est loin d'être rose au début du film, les rapports familiaux sont même décrits d'une façon très dure, et à l'inverse, le personnage d'Aman, sorte d'Amélie Poulain infatigable, maintient toujours une lueur de joie et d'espoir. On ne sort pas du film démoralisé. C'est une très belle trouvaille cet Aman, personnage chez qui la bonne humeur est une éthique, mais qui voit ses principes vaciller lorsqu'il se surprend à aimer. On peut quand même trouver contestable son sacrifice, même s'il a en vue le bonheur de Naina : chers scénaristes indiens, ça vous tuerait, pour une fois, de laisser un personnage féminin décider lui-même de ce qu'il veut faire de sa vie ?



Shahrukh fait du Shahrukh puissance mille, allergiques à son jeu s'abstenir. Mais je ne vois personne d'autre qui réussisse en une minute à me faire rire et pleurer. Son personnage est entouré d'une aura religieuse assez incroyable : il apparaît de dos, sur un bateau, l'écharpe au vent, alors que Naina prie Dieu de lui envoyer un ange. Lorsqu'il arrive dans le quartier (sous la neige, alors qu'on est en plein été !) la petite famille est agenouillée, en prière. A ses côtés Saif Ali Khan et Preity Zinta ne déméritent pourtant pas.





Pretty Woman




Le film est édité par Bodega sous le titre New-York Masala. Il y a quelques bonus : karaoké, making off qui montre la quantité de travail nécessaire à la réalisation d'une chorégraphie. Sous-titres français professionnels, parfaitement compréhensibles, mais traduits de l'anglais et bourrés de calques, ça m'énerve vraiment (même s'il n'y a que moi que ça gêne).

28.6.09

quelques genres musicaux indiens

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La musique de films s'inspire de toutes sortes de courants et de genres. Les musiques d'ailleurs sont bien sûre très présentes, sous des formes plus ou moins indianisées, mais je vais évoquer ici quelques genres indiens très exploités par les compositeurs de BO, qui bien souvent les simplifient ou les modernisent pour répondre aux attentes du public. Je ne suis pas particulièrement calée en musique, alors désolée pour les probables imprécisions . Si jamais, cher lecteur, tu t'y connais en musique indienne, n'hésite pas à laisser des commentaires pour corriger de possibles erreurs ou compléter la liste.



Un bhajan et un chant religieux en général lyrique. Les bhajans n'ont pas de forme fixe, on peut cependant noter que c'est l'un des genres dans lesquels rythmes et instruments occidentaux sont les moins présents.

chanté par deux bauls (musiciens bengali) dans le film de Bimal Roy Devdas



ou encore "Mann Mohana" du film Jodhaa Akbar

Le bhangra est un genre musical du Pendjab (Nord-Est de l'Inde). Ce type de chant et de danse populaire, généralement festif, est accompagné par le son du dhol, une sorte de tambour, et par des exclamations (hoy hoy ! balle balle ! haripa !...). Ce genre a toujours été présent dans les musiques de films panjabi mais aussi hindi, en partie grâce à l'influence d'acteurs et de producteurs panjabi (dont la famille Chopra). Dans ce cas, même si la chanson est en hindi, elle comporte souvent quelques mots ou tournures panjabi.


deux exemples :

dans les années 70, tiré du film Suhaag.

Plus récent, dans Rang de Basanti




Le dappa (ou Dappaankuthu, ou encore gaana) un type de danse de rue tamoule, très énergique, dansé lors d'occasion très diverses, allant du mariage aux funérailles. Les mouvements ne sont pas codifiés. Le rythme est rapide, les paroles n'ont pas forcément beaucoup de logique et sont parfois assez explicites. C'est un genre très populaire dans le cinéma tamoul.

Bharath et Arya dans Pattiyal



ou encore Vijay dans "Appadi Podu" du film Ghilli



Le ghazal est un genre poétique d'origine persane. Dans le sous-continent indien, les ghazals sont écrits en ourdou. De registre lyrique, ils traitent souvent de l'amour impossible, de la soufrance qui naît de la séparation. C'est une poésie très influencée par des motifs religieux, et notamment soufis. Au sens strict, il est composé de distiques et est caractérisé par la répétition d'un groupe de mots à la fin de chaque vers du premier distique, puis du second vers de chaque distique, ainsi que par une rime située avant ce refrain. Une forme très contraignante donc, qui incite à la virtuosité. La musique est assez calme, et met en relief la beauté des paroles et l'interprétation du chanteur. (Merci Wikipédia...)


Le qawwali est une musique religieuse soufie, dont les origines remontent au 8ème siècle. Nusrat Fateh Ali Khan en est l'un des interprètes les plus connus. Ils sont écrits en ourdou. Ces chants d'amour et de dévotion à Dieu peuvent très facilement être utilisé pour parler d'un amour plus profane, et les paroliers ne s'en privent pas. Les chanteurs (traditionnellement des hommes) sont accompagnés d'harmoniums (qui ont remplacé le sarangi d'un emploi moins pratique) et de percussions (tablas et dholaks). Les morceaux, qui durent souvent plusieurs dizaines de minutes, suivent un déroulement codifié faisant intervenir peu à peu les différents instruments et chanteurs. Le morceau va donc crescendo, ce qui en fait la musique idéale pour accompagner les moments de grande tension dramatique dans les films, mais il peut aussi être festif et intervenir lors de mariages. Le "filmi qawwali" ou qawwali de film est bien évidemment plus court, et prend bien des libertés avec le genre.

"Aaya tere dar par" - un qawwali assez traditionnel (Veer Zaara)



Un qawwali des seventies chanté par Mohammed Rafi : "Pardah hai pardah" (Amar Akbar Anthony)

une réinterprétation moderne du genre "Tumse milke dil ka hai jo haal" (Main hoon na)


20.4.09

Hey Ram - 2000 (tamoul / hindi)

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Je n'avais acheté ce film, il y a quelques années, que parce que SRK figurait en bonne place sur la jaquette : il n'a en réalité qu'un petit rôle, mais je n'ai pas pour autant regretté mon achat : Hey Ram est un film sombre, violent - car la période dont il parle l'était - mais pas loin d'être génial.

Un vieil homme malade, Saket Ram (Kamal Hassan) se souvient d'évènements survenus lors de l'obtention de l'indépendance et de la partition de l'Inde. Il menait alors une vie heureuse avec sa femme Aparna (Rani Mukherjee) . Bien que hindou, il avait pour meilleur ami un musulman, Amjad (Shah Rukh Khan). Mais lors d'émeutes inter-communautaires, Aparna est violée et tuée. Ram, fou de douleur, se laisse convaincre par un activiste hindou que c'est le Mahatma Gandhi qui est responsable de ces violences, du fait de son attitude amicale envers les musulmans. Il s'engage aux côtés de ces extrémistes.



Un petit mot sur SRK et Rani pour commencer : il sont tous les deux excellents, bien qu'on ne les voie que peu de temps. Ils ne volent cependant pas la vedette à Kamal Hassan, à la fois scénariste, réalisateur, et acteur de ce film. Ce type, que je voyais jouer pour la première fois, a une présence absolument incroyable, il est remarquable dans un rôle pourtant difficile et subtil. Le film est centré sur l'évolution psychologique de Ram et sur ses rapports avec son entourage, et en particulier avec sa seconde épouse qui fait tout son possible pour comprendre son problème mais se heurte à chaque fois à un mur. Kamal Hassan est tour à tour jeune marié insouciant, homme blessé, militant muré dans son obsession, effrayant et en même temps pitoyable, et adopte à chaque fois les changements d'apparence qui s'imposent : c'est un véritable caméléon dans ce film. En outre, les acteurs interprètent tous des personnages originaires de la région dont ils viennent, et on passe sans cesse de l'urdu au tamoul ou au Bengali, ce qui ajoute au réalisme.

Le scénario est très riche, peut-être un peu trop dans sa volonté de ne pas simplifier outre mesure des enjeux historiques complexes, et de ne pas sombrer dans le manichéisme. La peinture des affrontements entre communautés est pertinente : on voit ainsi des voyous qui profitent d'une journée d'action pour commettre des exactions, des hommes devenus violents et presque fous sous le coup de la douleur, et d'autres qui exploitent cette douleur et lui donnent un contenu idéologique. Le film ne m'a paru assez équilibré dans sa représentation des communautés hindoue et musulmane. Le crime dont est victime le personnage de Rani Mukherji est monstrueux, et représenté comme tel dans une scène très dure, mais le fondamentalisme hindou n'est pas présenté sous un jour plus favorable : il est le fait d'illuminés, de manipulateurs, d'aristocrates ne supportant pas la fin de leurs privilèges, et d'individus vulnérables sous influence. L'absurdité de leurs théories éclate au grand jour lors de la confrontation entre Ram et Amjad, qui incarne bon sens et volonté de paix. Kamal Hassan filme sans complaisance aucune la volonté de vengeance de son personnage et ses terribles conséquences. spoiler
Ram est ainsi bien malgré lui responsable de la mort de son meilleur ami, tué alors qu'il tentait de lui faire recouvrer la raison.
Il fait de Hey Ram une condamnation efficace de la loi du talion, sujet qui lui tient visiblement à cœur puisque son second film en tant que réalisateur, Virumandi, pourra se lire comme un plaidoyer contre la peine de mort.

Mais l'audace du film est surtout visible sur le plan formel : filmé en noir et blanc, un vieillard qu'on dit fou gît sur un lit d'hôpital. Il se souvient de sa jeunesse ; la couleur apparaît. Ce choix esthétique visible d'entrée de jeu annonce la volonté de Kamal Hassan d'exprimer le plus exactement possible l'état d'esprit de Ram et son évolution (pour le vieil homme grabataire qu'il est devenu, le présent a moins de réalité que les souvenirs), quitte à s'éloigner des conventions et du réalisme. Il recourt par moments à des procédés presque surréalistes : hallucinations de Ram en plein délire, caméra subjective pour faire ressentir les effets de la drogue sur sa perception du monde.... Parfois (souvent) ça passe, parfois ça frise le ridicule (Ram sur le point de faire l'amour à sa femme se transforme en arme à feu ...). D'autres passages sont au contraire très réalistes : il s'agit par exemple des moments de tendresse partagés par Ram et sa première épouse, plus explicites que dans d'autres films mais absolument pas vulgaires, ou, surtout, des flambées de violence qui encadrent le film et donnent l'impression d'un calme précaire où une étincelle (la chute accidentelle d'un pistolet dans un camion) peut tout embraser.

Image

Quelques passages vont sans doute rester assez longtemps dans ma mémoire : l'immense tendresse des quelques scènes que Ram partage avec Aparna, les affrontements dans le labyrinthe des ruelles du quartier musulman de Delhi, et le discours bouleversant qu'Amjad y tient à son ami retrouvé ; la chanson au cours de laquelle Ram retourne dans son ancienne habitation et se remémore les moments passés avec sa femme.

En un mot, c'est un film presque toujours à la hauteur de ses ambitions, et que j'aurais sans doute mieux apprécié encore si mon DVD avait été de meilleure qualité. (Si quelqu'un a une bonne édition, je serais ravie d'en avoir les références).

la première chanson, en version hindi :



18.4.09

Luck By Chance et Billu (2009)

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Deux films qui sont sortis au début de 2009, et qui parlent, chacun à sa façon, de l'industrie cinématographique de Bombay.
Il y a beaucoup à dire sur le goût de Bollywood pour la mise en abyme , et je renvoie à ce sujet à l'article de Señorita sur Fantastikindia. L'intérêt du cinéma indien pour ses coulisses n'est pas récent, et concerne aussi bien le cinéma du Sud que celui du Nord, mais il est particulièrement vif dans le cinéma en hindi de ces dernières années où les films sur ce sujet ont été très nombreux, et peinent parfois à proposer un regard neuf. Qu'en est-il de ses deux derniers avatars ?


Pour l'originalité, pas sûr que Billu soit le mieux placé. C'est en effet le remake du film tamoul Kuselan, lui même remake du film malayalam Katha Parayumpol, relecture de l'histoire de Krishna et Sudama. Ce dernier était un ami d'enfance de Krishna. Devenu adulte, il vit dans la pauvreté mais refuse d'aller demander de l'aide à son ami maintenant roi, malgré l'insistance de sa femme. Dans le film Billu (Irfan Khan) est coiffeur dans un petit village et a du mal à payer les frais de scolarisation de ses enfants. La vie du village est soudain bouleversée par l'arrivée d'une équipe de tournage : or la star du film (Shahrukh Khan) n'est autre que l'ami d'enfance de notre coiffeur, qui devient du jour au lendemain un héros.

C'est donc un regard extérieur qui est porté sur le cinéma : celui de Billu dont la vie est si différente de celle montrée dans les films, et, pense-t-il, de celle de son ami Sahir ; celui des villageois, tous fans de la star et prêts à tout pour l'approcher. Le cinéma semble d'ailleurs se résumer à cette star, ce Sahir Khan dont la carrière semble être un décalque de celle de son interprète. Il est d'ailleurs intéressant de comparer deux chansons, l'une du film tamoul, l'autre de Billu. "Cinema Cinema" de Kuselan parcourt tout le cinéma tamoul , dans un hommage à l'ensemble des acteurs qui y apparaissent quelques secondes dans des images d'archive. Bien sûr la vrai vedette du clip c'est la Superstar, Rajnikanth, qui nous est montré dans des séquences de films fictifs mais évoquant ceux dans lesquels il a joué, mais ces apparitions permettent d'inscrire son personnage dans la lignée de toutes ces autres stars, de donner l'impression qu'au fond la popularité de son personnage vient surtout de la fascination qu'exerce le métier d'acteur, plus que de la personne elle-même. Au contraire dans "Ae Aa O" de Billu, ce sont des images de film de Shahrukh Khan qui défilent en grand nombre. Les quelques caméos du film, uniquement féminins, ne sont là que pour ajouter à l'aura de la star en l'entourant d'actrices glamour. Du cinéma hindi on ne verra que King Khan : une fois n'est pas coutume, Billu dépasse son homologue tamoul en matière de glorification de la star.

Certes les villageois prêts à tout pour lui parler sont ridicules (et censés être drôles, mais malheureusement presque tous les gags tombent à plat), mais le film ne démystifie pas vraiment l'image de la star, présenté sans surprise comme un homme sympathique, à qui la célébrité n'a pas fait oublier ses amis. La leçon du film, exprimée dans un discours final plus didactique qu'émouvant, c'est qu'au fond Sahir Khan est un homme comme un autre, bien différent de l'image que ses films donnent de lui. Tout ça pour ça.







Luck By Chance, premier film de la réalisatrice Zoya Akhtar, présente un point de vue radicalement différent. Nous suivons deux aspirants acteurs, Sona (Konkona Sen Sharma), qui ne parvient à obtenir que de tout petits rôles dans des grosses productions et attend obstinément le premier rôle qui doit la lancer, promis autrefois par un producteur pas bien pressé de tenir parole, et Vikram (Farhan Akhtar), fraîchement arrivé à Mumbai, qui dispose de deux gros atouts : il n'a pas beaucoup de scrupules, et énormément de chance.

L'objectif clairement affiché est de montrer les coulisses pas forcément reluisantes de l'usine à rêve, à travers deux angles d'attaque qui ont une certaine pertinence, mais ne sont pas particulièrement originaux : le népotisme qui réduit terriblement les chances de Sona et de Vikram (ils ne viennent pas de ce milieu), et la pratique du casting couch, acceptée par les deux personnages. L'ensemble (ou presque) des acteurs semble vain, hypocrite, opportuniste, sans grande fidélité en amitié. Bref, tout l'inverse de Billu.

Ce qui rend cette critique du népotisme assez savoureuse, c'est qu'elle est réalisée et jouée par des gens qui sont tous sauf des outsiders, et qui ont pu convaincre un très grand nombre de leurs connaissances d'apparaître en guest stars ou dans des seconds rôles (il y a même Aamir Khan, pourtant peu coutumier du fait). La première moitié du film est malheureusement considérablement ralentie par le nombre de ces apparitions et par l'importance accordée au personnage de Hrithik Roshan, qui n'apporte pas grand chose au film si ce n'est un item number assez impressionnant.

Même si la critique reste assez convenue, le film est sauvé par sa galerie de personnages tous bien interprétés et souvent touchants malgré leur médiocrité, à l'image de la jeune Niki, fille de star arrogante mais au fond bien innocente, ou de sa mère jouée par Dimple Kapadia, ancienne vedette plus complexe qu'il n'y paraît. La musique est également assez bonne, et j'ai bien aimé la fin.


17.4.09

Kaala Patthar - 1979

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(encore un simple copier-coller d'un texte que j'avais écrit ailleurs. Quelle fainéante !)

de Yash Chopra, Avec Shashi Kapoor, Amitabh Bachchan, Neetu Singh, Parveen Babi, Rakhee Gulzar, Shatrughan Sinha
DVD YAshRaj "Forever Classics" - sous-titres anglais
164 min

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Vijay (Amitabh) est mineur. Bien qu'il passe son temps à venir courageusement en aide à ses camarades, ses nuits sont troublées par des cauchemars où il se fait traiter de lâche. Il trouve un peu de réconfort auprès de la doctoresse de la mine (Rakhee Gulzar). Ravi (Shashi) est ingénieur. Il arrive dans la même mine et prend rapidement le parti des travailleurs contre leur méchant patron, qui ne tient pas compte de ses avertissements concernant les risques d'inondation de la mine, mais il trouve quand même le temps de draguer Anita (Parveen Babi), journaliste venue enquêter sur les conditions de travail des mineurs. Mangal (Shatrughan Sinha) est un bagnard en fuite, qui trouve refuge dans la mine et entre immédiatement en conflit avec Vijay en même temps qu'il gagne le coeur de Channo ( Neetu Singh), qui vend aux mineurs des anneaux magiques.Tous ce petit monde se trouve obligé de surmonter ses tensions pour faire face au danger et trouver la rédemption.

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On prend la même équipe que pour Deewaar et on recommence ! Les personnages ont même les mêmes noms, la toile de fond sociale est plus ou moins identique, mais les deux films sont néanmoins très différents. On est loin de l'épure de Deewaar. Ici les intrigues se multiplient, au risque de perdre un peu l'intérêt du spectateur en cours de route (surtout au début, l'introduction de tous ces personnages prend du temps). En outre les toutes dernières minutes sont honteusement bâclées. Néanmoins on peut apprécier qu'à l'exception du méchant capitaliste très caricatural, tous les personnages possèdent une certaine profondeur, et se retrouvent sur le devant de la scène à un moment ou à un autre. Amitabh est bien entendu au cœur du film. Son personnage, c'est le moins qu'on puisse dire, ne respire pas la joie de vivre. Ses répliques sont malheureusement assez répétitives. Il gagne une autre dimension lorsque la raison de son mal-être, fortement inspirée d'une nouvelle de Joseph Conrad, spoiler
Lord Jim, dans laquelle un officier de marine cherche à se racheter après avoir abandonné son navire et ses passagers,
,est révélée.Le flash-back est d'ailleurs un des meilleurs passages du film. J'ai aussi bien aimé Shashi, et surtout Parveen Babi, en jeune femme pétillante et déterminée, qui mène Shashi par le bout du nez, et tient tête au propriétaire de la mine (on alors droit à une tirade sur les bienfaits de la nationalisation des mines, qui tombe comme un cheveu sur la soupe, mais était sans doute d'actualité).
En revanche, ce n'est pas tout à fait ça au niveau des effet spéciaux. Il ne vaut mieux pas, par exemple, comparer l'inondation de la mine avec celle d'Indiana Jones et le Temple Maudit. Au fond, cela ne m'a pas vraiment dérangée, les techniciens ont fait ce qu'ils pouvaient avec peu de moyens, et le suspens est assez fort pour qu'on n'y fasse pas trop attention.
Musique de Rajesh Roshan, pas vraiment mémorable, sauf la première chanson.

Kaala Patthar est un film qui a un certain nombre de défauts, mais qui est est au fond très sympathique, les trois heures passées en compagnie de ses personnages s'oublient difficilement.



Deewaar, 1975

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(reprise d'un texte que j'avais écrit sur dvdclassik)

avec Amitabh Bachchan, Shashi Kapoor, Neetu Singh, Parveen Babi, Nirupa Roy
174 min, dvd Eros original, sous-titres anglais uniquement.



Lors d'une grève un syndicaliste victime d'un chantage est obligé de trahir sa cause pour protéger sa femme et ses enfants. Accusé d'être un voleur par ses camarades, il fuit en abandonnant sa famille. Celle-ci survit péniblement. L'un des fils, Vijay, se sacrifie pour que Ravi, son frère plus brillant, puisse faire des études. Les deux frères suivent des chemins différents, jusqu'à devoir s'affronter lorsque Ravi, devenu officier de police, doit poursuivre Vijay qui a choisi la voie du crime.


Deewaar est un des films qui ont le plus contribué à faire d'Amitabh une star. Sa popularité est bien sûr due à l'interprétation de Big B dans un de ces rôles d'Angry young man qui allait devenir sa spécialité, mais aussi à l'exceptionnelle qualité du film. Le seul reproche que je puisse faire, c'est tout dire, est qu'il n'y a que trois chansons, c'est un peu juste.

Le scénario est extrêmement bien construit : il n'y a aucun élément inutile (ce qui contribue au classicisme du film, à son aspect presque dépouillé par rapport à beaucoup de films qui accumulent intrigues secondaires et coups de théâtre), et les personnages sont très cohérents. Les deux fils tentent à leur façon de surmonter le traumatisme de la "trahison" de leur père et d'aider leur mère de leur mieux. Vijay, marqué dans sa chair ( on lui a tatoué sur le bras "mon père est un voleur"), choisit (mais est-ce vraiment un choix ?) la voie qu'il croit lui être destinée, et qui lui permettra d'offrir enfin à sa mère tout ce qu'elle n'a jamais eu. Ravi s'insère dans la société, cherche un emploi, essuie moult refus, persévère. C'est le cadet, il est plus insouciant, mais on voit bien que son objectif est le même.Tout deux semblent vouloir compenser l'absence de leur père en faisant le bonheur de leur mère. Celle-ci joue un rôle central : elle est le seul lien entre les deux frères quand ils se retrouvent dans deux camps opposés, en même temps que l'enjeu plus ou moins inconscient de leur affrontement. A Ajay qui énumère tout ce que son activité de contrebandier lui a permis d'acquérir (voiture, bungalow...) et demande à son frère ce qu'il a, lui, Ravi répond "mere paas Maa hain", "Moi j'ai Maman". Réplique à peu près aussi connue en Inde que '"Luke, je suis ton père". Et après avoir entendu sa mère lui dire qu'elle a toujours préféré son frère, Ravi part seul accomplir une mission quasiment suicidaire.



Les relations entre les personnages sont donc complexes et intéressantes, et cela vaut aussi pour les histoires d'amour. Si celle de Ravi sert surtout à apporter un peu de légèreté et deux belles chansons, celle de Vijay est plus originale et plus creusée, Parveen Bibi interprétant un personnage qui devient de plus en plus subtil, et offre à Vijay une alternative à l'amour exclusif qu'il porte à sa mère. spoiler

D'ailleurs lorsqu'il accepte de l'épouser, il renonce à son activité clandestine, c'est à dire qu'il renonce à se consacrer uniquement au bonheur de sa mère comme l'aurait fait son père s'il n'était pas parti, pour fonder à son tour une famille.

De même la lutte fratricide est l'objet de réflexions intéressantes et pas trop manichéennes, faisant référence au Mahabharata. spoiler

au fond Ravi accepte de mener l'enquête sur son frère quand il comprend qu'en tenant compte de leur liens familiaux il se rend en quelque sorte coupable du même népotisme que celui dont il a été victime quand il cherchait un emploi, et que si Vijay avait été un petit voleur de pain anonyme il n'aurait pas hésité à l'arrêter.

Les questions sociales sont omniprésentes sans être envahissantes (la réalisation du film correspond à une période de fortes tensions sociales en Inde).
La mise en scène élégante renforce l'impression de regarder une tragédie classique, où tout est bien ordonné pour amener la catastrophe, sans que les personnages soient pour autant des pions, ils ont tous une consistance et une humanité rare.

Au niveau des interprétations, le contraste entre les jeux de Shashi Kapoor et d'Amitabh Bachchan, si souvent exploité, fonctionne à merveille. Amitabh, en particulier, arrive à infuser à son personnage une intensité remarquable. Shashi est plus dans la nuance, les changements rapides d'expressions. C'est plus mon type de jeu, mais tous les deux sont ici très bons.
Trois chansons donc, dont une chorégraphiée. Que du bon de ce côté là aussi, dommage qu'il n'y en ai pas plus.