(reprise d'un texte que j'avais écrit sur dvdclassik)
avec Amitabh Bachchan, Shashi Kapoor, Neetu Singh, Parveen Babi, Nirupa Roy
174 min, dvd Eros original, sous-titres anglais uniquement.
Lors d'une grève un syndicaliste victime d'un chantage est obligé de trahir sa cause pour protéger sa femme et ses enfants. Accusé d'être un voleur par ses camarades, il fuit en abandonnant sa famille. Celle-ci survit péniblement. L'un des fils, Vijay, se sacrifie pour que Ravi, son frère plus brillant, puisse faire des études. Les deux frères suivent des chemins différents, jusqu'à devoir s'affronter lorsque Ravi, devenu officier de police, doit poursuivre Vijay qui a choisi la voie du crime.
Deewaar est un des films qui ont le plus contribué à faire d'Amitabh une star. Sa popularité est bien sûr due à l'interprétation de Big B dans un de ces rôles d'Angry young man qui allait devenir sa spécialité, mais aussi à l'exceptionnelle qualité du film. Le seul reproche que je puisse faire, c'est tout dire, est qu'il n'y a que trois chansons, c'est un peu juste.
Le scénario est extrêmement bien construit : il n'y a aucun élément inutile (ce qui contribue au classicisme du film, à son aspect presque dépouillé par rapport à beaucoup de films qui accumulent intrigues secondaires et coups de théâtre), et les personnages sont très cohérents. Les deux fils tentent à leur façon de surmonter le traumatisme de la "trahison" de leur père et d'aider leur mère de leur mieux. Vijay, marqué dans sa chair ( on lui a tatoué sur le bras "mon père est un voleur"), choisit (mais est-ce vraiment un choix ?) la voie qu'il croit lui être destinée, et qui lui permettra d'offrir enfin à sa mère tout ce qu'elle n'a jamais eu. Ravi s'insère dans la société, cherche un emploi, essuie moult refus, persévère. C'est le cadet, il est plus insouciant, mais on voit bien que son objectif est le même.Tout deux semblent vouloir compenser l'absence de leur père en faisant le bonheur de leur mère. Celle-ci joue un rôle central : elle est le seul lien entre les deux frères quand ils se retrouvent dans deux camps opposés, en même temps que l'enjeu plus ou moins inconscient de leur affrontement. A Ajay qui énumère tout ce que son activité de contrebandier lui a permis d'acquérir (voiture, bungalow...) et demande à son frère ce qu'il a, lui, Ravi répond "mere paas Maa hain", "Moi j'ai Maman". Réplique à peu près aussi connue en Inde que '"Luke, je suis ton père". Et après avoir entendu sa mère lui dire qu'elle a toujours préféré son frère, Ravi part seul accomplir une mission quasiment suicidaire.
Les relations entre les personnages sont donc complexes et intéressantes, et cela vaut aussi pour les histoires d'amour. Si celle de Ravi sert surtout à apporter un peu de légèreté et deux belles chansons, celle de Vijay est plus originale et plus creusée, Parveen Bibi interprétant un personnage qui devient de plus en plus subtil, et offre à Vijay une alternative à l'amour exclusif qu'il porte à sa mère. spoiler
D'ailleurs lorsqu'il accepte de l'épouser, il renonce à son activité clandestine, c'est à dire qu'il renonce à se consacrer uniquement au bonheur de sa mère comme l'aurait fait son père s'il n'était pas parti, pour fonder à son tour une famille.
De même la lutte fratricide est l'objet de réflexions intéressantes et pas trop manichéennes, faisant référence au Mahabharata. spoiler
au fond Ravi accepte de mener l'enquête sur son frère quand il comprend qu'en tenant compte de leur liens familiaux il se rend en quelque sorte coupable du même népotisme que celui dont il a été victime quand il cherchait un emploi, et que si Vijay avait été un petit voleur de pain anonyme il n'aurait pas hésité à l'arrêter.
Les questions sociales sont omniprésentes sans être envahissantes (la réalisation du film correspond à une période de fortes tensions sociales en Inde).
La mise en scène élégante renforce l'impression de regarder une tragédie classique, où tout est bien ordonné pour amener la catastrophe, sans que les personnages soient pour autant des pions, ils ont tous une consistance et une humanité rare.
Au niveau des interprétations, le contraste entre les jeux de Shashi Kapoor et d'Amitabh Bachchan, si souvent exploité, fonctionne à merveille. Amitabh, en particulier, arrive à infuser à son personnage une intensité remarquable. Shashi est plus dans la nuance, les changements rapides d'expressions. C'est plus mon type de jeu, mais tous les deux sont ici très bons.
Trois chansons donc, dont une chorégraphiée. Que du bon de ce côté là aussi, dommage qu'il n'y en ai pas plus.
174 min, dvd Eros original, sous-titres anglais uniquement.
Lors d'une grève un syndicaliste victime d'un chantage est obligé de trahir sa cause pour protéger sa femme et ses enfants. Accusé d'être un voleur par ses camarades, il fuit en abandonnant sa famille. Celle-ci survit péniblement. L'un des fils, Vijay, se sacrifie pour que Ravi, son frère plus brillant, puisse faire des études. Les deux frères suivent des chemins différents, jusqu'à devoir s'affronter lorsque Ravi, devenu officier de police, doit poursuivre Vijay qui a choisi la voie du crime.
Deewaar est un des films qui ont le plus contribué à faire d'Amitabh une star. Sa popularité est bien sûr due à l'interprétation de Big B dans un de ces rôles d'Angry young man qui allait devenir sa spécialité, mais aussi à l'exceptionnelle qualité du film. Le seul reproche que je puisse faire, c'est tout dire, est qu'il n'y a que trois chansons, c'est un peu juste.
Le scénario est extrêmement bien construit : il n'y a aucun élément inutile (ce qui contribue au classicisme du film, à son aspect presque dépouillé par rapport à beaucoup de films qui accumulent intrigues secondaires et coups de théâtre), et les personnages sont très cohérents. Les deux fils tentent à leur façon de surmonter le traumatisme de la "trahison" de leur père et d'aider leur mère de leur mieux. Vijay, marqué dans sa chair ( on lui a tatoué sur le bras "mon père est un voleur"), choisit (mais est-ce vraiment un choix ?) la voie qu'il croit lui être destinée, et qui lui permettra d'offrir enfin à sa mère tout ce qu'elle n'a jamais eu. Ravi s'insère dans la société, cherche un emploi, essuie moult refus, persévère. C'est le cadet, il est plus insouciant, mais on voit bien que son objectif est le même.Tout deux semblent vouloir compenser l'absence de leur père en faisant le bonheur de leur mère. Celle-ci joue un rôle central : elle est le seul lien entre les deux frères quand ils se retrouvent dans deux camps opposés, en même temps que l'enjeu plus ou moins inconscient de leur affrontement. A Ajay qui énumère tout ce que son activité de contrebandier lui a permis d'acquérir (voiture, bungalow...) et demande à son frère ce qu'il a, lui, Ravi répond "mere paas Maa hain", "Moi j'ai Maman". Réplique à peu près aussi connue en Inde que '"Luke, je suis ton père". Et après avoir entendu sa mère lui dire qu'elle a toujours préféré son frère, Ravi part seul accomplir une mission quasiment suicidaire.
Les relations entre les personnages sont donc complexes et intéressantes, et cela vaut aussi pour les histoires d'amour. Si celle de Ravi sert surtout à apporter un peu de légèreté et deux belles chansons, celle de Vijay est plus originale et plus creusée, Parveen Bibi interprétant un personnage qui devient de plus en plus subtil, et offre à Vijay une alternative à l'amour exclusif qu'il porte à sa mère. spoiler
D'ailleurs lorsqu'il accepte de l'épouser, il renonce à son activité clandestine, c'est à dire qu'il renonce à se consacrer uniquement au bonheur de sa mère comme l'aurait fait son père s'il n'était pas parti, pour fonder à son tour une famille.
De même la lutte fratricide est l'objet de réflexions intéressantes et pas trop manichéennes, faisant référence au Mahabharata. spoiler
au fond Ravi accepte de mener l'enquête sur son frère quand il comprend qu'en tenant compte de leur liens familiaux il se rend en quelque sorte coupable du même népotisme que celui dont il a été victime quand il cherchait un emploi, et que si Vijay avait été un petit voleur de pain anonyme il n'aurait pas hésité à l'arrêter.
Les questions sociales sont omniprésentes sans être envahissantes (la réalisation du film correspond à une période de fortes tensions sociales en Inde).
La mise en scène élégante renforce l'impression de regarder une tragédie classique, où tout est bien ordonné pour amener la catastrophe, sans que les personnages soient pour autant des pions, ils ont tous une consistance et une humanité rare.
Au niveau des interprétations, le contraste entre les jeux de Shashi Kapoor et d'Amitabh Bachchan, si souvent exploité, fonctionne à merveille. Amitabh, en particulier, arrive à infuser à son personnage une intensité remarquable. Shashi est plus dans la nuance, les changements rapides d'expressions. C'est plus mon type de jeu, mais tous les deux sont ici très bons.
Trois chansons donc, dont une chorégraphiée. Que du bon de ce côté là aussi, dommage qu'il n'y en ai pas plus.
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